Comment MEC et moi avons fait de la place dans notre 1½ pour nos meilleurs amis respectifs en visite.
Pas toujours facile de vivre à deux. MEC et moi avions quand même été bons jusque-là en partageant une chambre à Montréal dans un grand 5½ avec des colocs. Lorsque nous avons déménagé ensemble au Yukon, nous avons pris un appartement de style loft, à l'espace très restreint. Il nous fallait constamment faire des compromis et respecter l'espace personnel de l'autre. Nous avions le frigo ET notre lit à deux étages dans l'entrée. Notre cuisine-salon-salle à manger devait aussi accueillir nos bureaux de travail. C'était vraiment un petit appartement où on se pile sur les pieds !
À la base, vivre en couple demande beaucoup de patience, parce que partager un même espace de vie quotidiennement peut devenir contraignant et envahissant. De plus, MEC et moi n'avions pas de cercle social à nos débuts au Yukon et nous comptions toujours sur l'autre pour être l'ami en même temps que le partenaire. Pourtant, après un moment, notre routine était mieux définie, et nous avions chacun déterminé nos limites. Nous savions que la visite de nos amis allait modifier notre quotidien et aussi, notre espace. Nous étions tous les deux préparés mentalement à leur venue et nous avions très hâte de les revoir après plusieurs mois de séparation.
Le meilleur ami de MEC, Guigui, venait en visite pour une durée d'environ un mois et demi et nous lui avions réservé une place dans la cuisine-salon-salle à manger, où nous avions installé un lit et bougé la table de la cuisine dans l'entrée près de notre lit à deux étages. Guigui voulait passer du temps avec MEC, visiter le Yukon et aussi, travailler pour rentabiliser les dépenses de son séjour. Ma meilleure amie, Alexe, arriverait plus tard dans l'été, et resterait dix jours, mais serait à l'appartement en même temps que Guigui vivrait ses derniers jours avec nous. Il fallait penser à faire de la place pour deux amis et espérer que tout le monde s'entende bien... Guigui avait accepté à contrecoeur de dormir sur le divan lorsqu'Alexe passerait ses journées à l'appartement et occuperait le lit. Nous ne voulions pas forcer nos amis, qui ne se connaissaient pas, à partager le grand lit. Nous étions optimistes que nous ferions du mieux que nous pouvions pour les accommoder.
Au départ, je dois l'avouer, je n'étais pas chaude à l'idée d'héberger Guigui pour presque deux mois et je trouvais ça long un peu. J'ai tenté de trouver des solutions pour qu'il puisse diviser le temps qu'il passerait à l'appartement et ailleurs, mais ça n'a pas fonctionné. D'ailleurs, je n'ai jamais eu le grand bout du bâton avec MEC, qui finit toujours par obtenir ce qu'il souhaite de moi. Je n'ai jamais été très hospitalière et j'aimais le confort de pouvoir faire ce que je voulais chez moi aux heures qui me plaisaient. Notre appartement à aire ouverte n'offrait pas beaucoup d'options en terme d'intimité, sans murs fermés ni portes, et cela me dérangeait. Je savais que je travaillerais énormément durant l'été, jonglant avec deux emplois en même temps, et je ne voulais pas que les soirées chez moi se transforment en party, m'empêchant de dormir. Je savais que je disais adieu à plusieurs aspects de ma liberté.
Néanmoins, j'avais hâte. Lorsque Guigui est arrivé, nous avions l'habitude de souper les trois ensemble et de faire quelques activités le soir également, lorsque je ne travaillais pas. Mais c'est ça le hic : je travaillais presque tout le temps et parfois jusqu'à très tard en soirée. Résultat : je ne sortais pas avec les gars et je me retrouvais seule lorsque je rentrais à la maison. J'étais souvent laissée à moi-même le soir, puisqu'ils étaient déjà partis faire des activités ensemble vers l'heure du souper. Je trouvais ça bien et je respectais le fait qu'ils sortent entre amis, et avec d'autres de nos amis yukonnais également, par contre, je m'ennuyais. J'avais l'impression de vraiment rater mon été en travaillant si tard et à temps plein. J'étais comme prise au piège de mes propres choix. Je me sentais aussi mise de côté, ayant été le centre de l'attention de MEC depuis avril. C'était difficile pour moi de ne plus être la priorité et de me sentir envahie à tous les niveaux. J'avais l'impression de ne plus être chez moi vraiment, de ne pouvoir prendre les décisions que je voulais et de devoir partager des trucs que je ne voulais pas partager. Je jonglais entre des sentiments de fatigue extrême, d'injustice, de jalousie et d'impatience. J'étais très souvent la gâcheuse de party, même s'il n'y en avait pas vraiment chez nous. J'étais souvent en colère, j'avais la mèche courte et je réagissais au contraire de ce que je ressentais vraiment. Je faisais des efforts pourtant, et quelques fois mon humeur tournait à l'inverse et j'étais très drôle, amusante, de bonne compagnie. Inutile de dire que tout cela n'a fait qu'ébranler notre couple. MEC ne savait plus où donner de la tête, ni comment me parler. MEC m'a avoué plus tard que j'ai été monstrueuse cet été-là, à cause de mes réactions exagérées, de mes colères excessives et de ma violence verbale et physique injustes. Je me rappelle être souvent partie en claquant la porte, avoir eu des comportements dangereux, je me rappelle exactement chaque parole blessante sortie de ma bouche, et je revois le gouffre dans lequel je m'étais enfoncée. Plus je vivais ces instants de lucidité sur mon comportement, plus je me détestais, et plus je voulais simplement disparaître. J'avais l'impression qu'on avait pris ma place, que je n'étais plus la bienvenue, et qu'on ne m'aimait tout simplement plus. J'avais envie de quitter ce minuscule appartement et de me trouver un endroit où passer l'été sans personne autour.
J'étais à un stade assez avancé de déprime et de noirceur lorsqu'Alexe est arrivée plus tard dans l'été. J'étais épuisée : du travail, des relations sociales, des situations stressantes, mais aussi de ma vie en général et de mon propre comportement. C'était tout simplement trop pour moi de vivre tous ces mélanges simultanément. Je commençais à comprendre et à réaliser à quel point j'avais une attitude néfaste qui ne se contrôlait plus. J'avais simplement dépassé les bornes et je n'arrivais plus à revenir en arrière. Je n'étais plus la même Milie. Alexe était très heureuse de me voir à son arrivée et nous avons certes passé de bons moments ensemble, mais je ne lui ai pas donné l'attention ni le temps qu'elle méritait. J'ai été une mauvaise amie cet été-là lors de sa visite. Je n'arrivais plus à m'amuser, à lâcher prise sur les détails, à éviter les déclencheurs de stress qui me rendaient hors de moi. Vraiment, quelque chose s'est déclenché en moi et je ne pouvais plus l'arrêter. J'ai compris plus tard de quoi il s'agissait : j'avais une maladie mentale. Mais ce n'est que bien plus tard que je l'ai découvert et que les choses sont rentrées dans l'ordre.
Ce n'était plus tant la place qui manquait dans l'appartement qui posait problème, mais la place qui manquait dans mon coeur. J'avais fermé toutes les portes : au plaisir, à l'amitié, à la joie, à la patience, au soleil. Je ne pensais plus qu'à ma souffrance et je ne la comprenais pas non plus. C'était facile de ne rien démontrer aux autres qui n'étaient pas dans cet univers de tempête à mes côtés, comme à mes proches, mes collègues de travail ou des connaissances... Mais ceux qui étaient dans cet appartement ont partagé l'enfer de mon univers, et ils ne méritaient pas d'être touchés par cet ouragan.
On dit souvent que le temps arrange les choses, et c'est vrai en partie : avec le recul, j'ai reconnu mes torts, j'ai accepté mes problèmes et je les règle toujours petit à petit au fil des semaines. Rien ne pourra pourtant racheter le mal que j'ai causé à nos amis, la peine, la déception, le ressentiment, et aussi, le péril dans lequel j'ai placé notre couple. MEC, Guigui et Alexe m'ont peut-être pardonnée en majeure partie, mais les cicatrices restent présentes. Je me sens toujours mal à l'aise de la douleur que j'ai laissée derrière suite à mon attitude déplaisante, voire inacceptable. Je n'aime pas repenser à cet été que j'ai gâché, et pour moi, les plaies sont encore ouvertes.
J'ai pourtant adoré la visite de nos amis, je trouve ces personnes merveilleuses, uniques et tellement gentilles d'être venues nous rendre visite à l'autre bout du monde. Je repense aux bons moments que nous avons passés, aux roadtrips, aux sorties, aux bières. Réaliser le temps que j'ai perdu à ressentir des sentiments néfastes me fait de la peine. Au moins, j'ai compris que plus jamais je ne me laisserai abattre. Je suis devenue plus forte aujourd'hui et j'ai compris que je suis la seule responsable de mes paroles, de mes actes et de mes sentiments. Il m'aura fallu vivre l'enfer et le faire vivre aux personnes que j'aime le plus pour réaliser l'importance de se battre continuellement pour le bonheur.
À la base, vivre en couple demande beaucoup de patience, parce que partager un même espace de vie quotidiennement peut devenir contraignant et envahissant. De plus, MEC et moi n'avions pas de cercle social à nos débuts au Yukon et nous comptions toujours sur l'autre pour être l'ami en même temps que le partenaire. Pourtant, après un moment, notre routine était mieux définie, et nous avions chacun déterminé nos limites. Nous savions que la visite de nos amis allait modifier notre quotidien et aussi, notre espace. Nous étions tous les deux préparés mentalement à leur venue et nous avions très hâte de les revoir après plusieurs mois de séparation.
Le meilleur ami de MEC, Guigui, venait en visite pour une durée d'environ un mois et demi et nous lui avions réservé une place dans la cuisine-salon-salle à manger, où nous avions installé un lit et bougé la table de la cuisine dans l'entrée près de notre lit à deux étages. Guigui voulait passer du temps avec MEC, visiter le Yukon et aussi, travailler pour rentabiliser les dépenses de son séjour. Ma meilleure amie, Alexe, arriverait plus tard dans l'été, et resterait dix jours, mais serait à l'appartement en même temps que Guigui vivrait ses derniers jours avec nous. Il fallait penser à faire de la place pour deux amis et espérer que tout le monde s'entende bien... Guigui avait accepté à contrecoeur de dormir sur le divan lorsqu'Alexe passerait ses journées à l'appartement et occuperait le lit. Nous ne voulions pas forcer nos amis, qui ne se connaissaient pas, à partager le grand lit. Nous étions optimistes que nous ferions du mieux que nous pouvions pour les accommoder.
Au départ, je dois l'avouer, je n'étais pas chaude à l'idée d'héberger Guigui pour presque deux mois et je trouvais ça long un peu. J'ai tenté de trouver des solutions pour qu'il puisse diviser le temps qu'il passerait à l'appartement et ailleurs, mais ça n'a pas fonctionné. D'ailleurs, je n'ai jamais eu le grand bout du bâton avec MEC, qui finit toujours par obtenir ce qu'il souhaite de moi. Je n'ai jamais été très hospitalière et j'aimais le confort de pouvoir faire ce que je voulais chez moi aux heures qui me plaisaient. Notre appartement à aire ouverte n'offrait pas beaucoup d'options en terme d'intimité, sans murs fermés ni portes, et cela me dérangeait. Je savais que je travaillerais énormément durant l'été, jonglant avec deux emplois en même temps, et je ne voulais pas que les soirées chez moi se transforment en party, m'empêchant de dormir. Je savais que je disais adieu à plusieurs aspects de ma liberté.
Néanmoins, j'avais hâte. Lorsque Guigui est arrivé, nous avions l'habitude de souper les trois ensemble et de faire quelques activités le soir également, lorsque je ne travaillais pas. Mais c'est ça le hic : je travaillais presque tout le temps et parfois jusqu'à très tard en soirée. Résultat : je ne sortais pas avec les gars et je me retrouvais seule lorsque je rentrais à la maison. J'étais souvent laissée à moi-même le soir, puisqu'ils étaient déjà partis faire des activités ensemble vers l'heure du souper. Je trouvais ça bien et je respectais le fait qu'ils sortent entre amis, et avec d'autres de nos amis yukonnais également, par contre, je m'ennuyais. J'avais l'impression de vraiment rater mon été en travaillant si tard et à temps plein. J'étais comme prise au piège de mes propres choix. Je me sentais aussi mise de côté, ayant été le centre de l'attention de MEC depuis avril. C'était difficile pour moi de ne plus être la priorité et de me sentir envahie à tous les niveaux. J'avais l'impression de ne plus être chez moi vraiment, de ne pouvoir prendre les décisions que je voulais et de devoir partager des trucs que je ne voulais pas partager. Je jonglais entre des sentiments de fatigue extrême, d'injustice, de jalousie et d'impatience. J'étais très souvent la gâcheuse de party, même s'il n'y en avait pas vraiment chez nous. J'étais souvent en colère, j'avais la mèche courte et je réagissais au contraire de ce que je ressentais vraiment. Je faisais des efforts pourtant, et quelques fois mon humeur tournait à l'inverse et j'étais très drôle, amusante, de bonne compagnie. Inutile de dire que tout cela n'a fait qu'ébranler notre couple. MEC ne savait plus où donner de la tête, ni comment me parler. MEC m'a avoué plus tard que j'ai été monstrueuse cet été-là, à cause de mes réactions exagérées, de mes colères excessives et de ma violence verbale et physique injustes. Je me rappelle être souvent partie en claquant la porte, avoir eu des comportements dangereux, je me rappelle exactement chaque parole blessante sortie de ma bouche, et je revois le gouffre dans lequel je m'étais enfoncée. Plus je vivais ces instants de lucidité sur mon comportement, plus je me détestais, et plus je voulais simplement disparaître. J'avais l'impression qu'on avait pris ma place, que je n'étais plus la bienvenue, et qu'on ne m'aimait tout simplement plus. J'avais envie de quitter ce minuscule appartement et de me trouver un endroit où passer l'été sans personne autour.
J'étais à un stade assez avancé de déprime et de noirceur lorsqu'Alexe est arrivée plus tard dans l'été. J'étais épuisée : du travail, des relations sociales, des situations stressantes, mais aussi de ma vie en général et de mon propre comportement. C'était tout simplement trop pour moi de vivre tous ces mélanges simultanément. Je commençais à comprendre et à réaliser à quel point j'avais une attitude néfaste qui ne se contrôlait plus. J'avais simplement dépassé les bornes et je n'arrivais plus à revenir en arrière. Je n'étais plus la même Milie. Alexe était très heureuse de me voir à son arrivée et nous avons certes passé de bons moments ensemble, mais je ne lui ai pas donné l'attention ni le temps qu'elle méritait. J'ai été une mauvaise amie cet été-là lors de sa visite. Je n'arrivais plus à m'amuser, à lâcher prise sur les détails, à éviter les déclencheurs de stress qui me rendaient hors de moi. Vraiment, quelque chose s'est déclenché en moi et je ne pouvais plus l'arrêter. J'ai compris plus tard de quoi il s'agissait : j'avais une maladie mentale. Mais ce n'est que bien plus tard que je l'ai découvert et que les choses sont rentrées dans l'ordre.
Ce n'était plus tant la place qui manquait dans l'appartement qui posait problème, mais la place qui manquait dans mon coeur. J'avais fermé toutes les portes : au plaisir, à l'amitié, à la joie, à la patience, au soleil. Je ne pensais plus qu'à ma souffrance et je ne la comprenais pas non plus. C'était facile de ne rien démontrer aux autres qui n'étaient pas dans cet univers de tempête à mes côtés, comme à mes proches, mes collègues de travail ou des connaissances... Mais ceux qui étaient dans cet appartement ont partagé l'enfer de mon univers, et ils ne méritaient pas d'être touchés par cet ouragan.
On dit souvent que le temps arrange les choses, et c'est vrai en partie : avec le recul, j'ai reconnu mes torts, j'ai accepté mes problèmes et je les règle toujours petit à petit au fil des semaines. Rien ne pourra pourtant racheter le mal que j'ai causé à nos amis, la peine, la déception, le ressentiment, et aussi, le péril dans lequel j'ai placé notre couple. MEC, Guigui et Alexe m'ont peut-être pardonnée en majeure partie, mais les cicatrices restent présentes. Je me sens toujours mal à l'aise de la douleur que j'ai laissée derrière suite à mon attitude déplaisante, voire inacceptable. Je n'aime pas repenser à cet été que j'ai gâché, et pour moi, les plaies sont encore ouvertes.
J'ai pourtant adoré la visite de nos amis, je trouve ces personnes merveilleuses, uniques et tellement gentilles d'être venues nous rendre visite à l'autre bout du monde. Je repense aux bons moments que nous avons passés, aux roadtrips, aux sorties, aux bières. Réaliser le temps que j'ai perdu à ressentir des sentiments néfastes me fait de la peine. Au moins, j'ai compris que plus jamais je ne me laisserai abattre. Je suis devenue plus forte aujourd'hui et j'ai compris que je suis la seule responsable de mes paroles, de mes actes et de mes sentiments. Il m'aura fallu vivre l'enfer et le faire vivre aux personnes que j'aime le plus pour réaliser l'importance de se battre continuellement pour le bonheur.