Les joies et les peines d'avoir trop de temps libre chez soi : ce que je fais, et ce que je ne fais pas.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, j'ai été souvent prise avec trop de temps libre ces derniers mois, si bien que je ne savais plus quoi faire de ma peau. C'est une responsabilité difficile que de chercher à occuper son temps lorsqu'on en a trop, bien pire selon moi que de jouer à déplacer ses rendez-vous, ses plans et ses projets entre les cases vides de son agenda et de tout emboîter comme des casse-têtes sans décevoir personne.
Quand on a trop de temps et trop peu de projets pour l'occuper, on sent que notre vie n'a aucun sens. Qu'on ne s'en va nulle part véritablement et qu'on perd tout ce précieux temps à ne rien faire plutôt qu'à changer le monde, par exemple. Je suis toujours vivante pour le raconter, mais à certains moments où il y avait tous ces trous dans mon quotidien, je me sentais si inutile, comme si simplement vivre pour ne rien accomplir était invalide et impensable. Je savais pertinemment que quiconque aurait payé cher pour se retrouver dans mes chaussures - ou dois-je dire, mes pantoufles -, et d'être gratifié de tout ce temps à remplir. C'est vrai : dans notre société où le succès rime avec effort et que l'effort se caractérise par le travail, on assimile bien mal le fait qu'une personne n'occupe pas son temps à travailler et du coup, à tendre vers le succès pour s'accomplir. Je savais que ma situation était temporaire, mais parce que j'avais appris tous ces concepts que la société m'avait inculqués durant mon parcours académique, il m'était difficile de voir les choses autrement. Que j'avais le droit de respirer, de rester en robe de chambre toute la journée, de n'avoir aucun rêve ou objectif immédiat et d'être tout de même une personne valable de la société qui pourra tendre vers ce si précieux succès plus tard dans sa vie.
Je n'ai pas eu de plaisir au début à avoir tout ce temps libre qui pesait lourd sur mes épaules. Je sentais que j'avais une responsabilité envers l'humanité de contribuer à son épanouissement et que ma réaction de ne rien faire chez moi n'était pas une solution socialement acceptable. Je cherchais toujours un emploi, mais rien n'arrivait à satisfaire mes ambitions et si une entreprise m'intéressait, je n'étais pas la bonne candidate. J'ai donc cessé d'investir autant d'efforts pour finir les mains vides et j'ai accepté de rester chez moi pour un bout de temps. J'en avais peut-être besoin?
J'avais ce doute sur ma raison de vivre, sur ma valeur et j'étais excessivement dure avec moi-même. Jusqu'à ce que je prenne du recul et que je me donne le droit de regarder les faits d'une manière plus lucide : j'avais eu beaucoup de succès durant mes études, j'avais sacrifié et mis de côté tous mes loisirs pendant de nombreuses années, j'avais remporté de nombreux prix qui m'avaient distinguée de mes pairs et qui témoignaient de mes efforts soutenus, j'avais élaboré de nombreux projets et fait de nombreuses listes -mes fameuses listes...-, j'étais bien entourée et heureuse en général, j'avais toujours des rêves et des ambitions futures, je conservais cette personnalité que j'avais bâtie depuis mon plus jeune âge, bref. Me rappeler ma valeur était crucial devant ce jugement très dur que je posais sur moi-même en cette période que je qualifie de pause professionnelle. Je me rappellerais sans doute cette longue pause interminable dans quelques années comme un moment privilégié de mon existence. Ne restait plus qu'à le faire compter.
J'ai misé sur la redécouverte de ma personne durant la pause, donc d'un point de vue plus privé, cet instant de ma vie m'a permis de reprendre du mieux et de reconsidérer toutes les avenues possibles de ma vie. Je n'aurais sans doute jamais franchi ce pas si j'avais été occupée comme j'avais l'habitude de l'être, avec les études, le travail et les activités en plus. Et cela m'a d'ailleurs amenée à réaliser à quel point notre société moderne oublie l'importance de la santé mentale comme base primordiale au succès, qu'il se manifeste dans l'une ou dans l'autre des facettes de notre vie. J'ai réalisé à quel point je me suis infligée du mal en me privant de sorties, d'emplois, d'opportunités, de moments de détente, le tout durant mes études où je tendais vers ce succès académique de manière - avouons-le maintenant - maladive. J'ai réalisé qu'en remplissant ce temps et tous ces trous dans mon agenda, je me rendais psychologiquement et physiquement malade. Je passerais d'ailleurs de nombreux mois durant ma pause à réparer ces séquelles que je m'étais infligées et toute cette négligence envers la base que je suis : ma personne avant tout, mon corps, mon mental et mon âme. Tant de gens que je connais ne prennent aucun instant pour eux seuls, ne se dorlotent jamais, ne s'arrêtent jamais pour vivre ce si précieux instant présent que tous semblent voir comme une entité presque divine aujourd'hui. Il m'aura fallu constater les dégâts trop tard et longtemps après coup pour pleinement réaliser la négligence dont j'étais désormais affligée.
Ma pause m'a permis de cesser la critique envers mon inaction, mais aussi envers mes actions. J'ai cessé de prioriser catégoriquement toutes ces choses par devoir avant celles qui me permettaient de profiter de la vie, d'être heureuse et en santé. Je me suis mise à méditer et à reprendre le yoga là où je l'avais laissé. Je me suis permis d'apprendre que ne rien faire pouvait m'apporter du bon. Lâcher prise sur le sérieux de l'existence. Je me suis intéressée aux jeux vidéos, qui n'apportent rien d'autre que du loisir et que je voyais avant comme une perte de temps totale. J'ai cuisiné beaucoup et j'ai pris du temps pour faire plaisir à MEC davantage qu'auparavant par de petites attentions. J'écoutais mieux mes amis et mes proches. J'ai pris des marches, j'ai pris de nombreux moments pour apprécier la qualité de ma vie et la beauté de la nature sauvage du Yukon. J'ai fait des plans pour mon futur, des trucs que j'avais mis de côté ou que je m'étais dit que je ne serais jamais capable d'accomplir. J'ai écouté de nombreux documentaires pour apprendre et garder la flamme de la connaissance toujours allumée dans mon esprit. J'ai lu beaucoup, tricoté, dessiné, écrit. J'ai guéri de mes anciennes blessures en laissant le passé derrière moi. J'ai pris des bains aussi, chose que je ne m'étais pas permis de faire depuis longtemps, comme si j'avais abandonné la relaxation. J'ai aussi réappris à prendre soin de mon corps, à m'offrir du repos de qualité et à investir dans le confort. J'ai racheté du maquillage et j'ai pris davantage de temps à me dorloter et à embellir mon image que j'avais négligée.
J'ai davantage appris en ne faisant pas grand chose qu'en voulant tout faire en même temps. J'ai appris à déterminer de nouvelles limites et à rêver de projets ambitieux. J'ai appris à ne rien faire et à être tout de même bien et heureuse. J'ai appris à reconnaître que pour moi, le succès véritable est celui de savoir contrôler sa vision-même du succès. Je me suis découvert une force intérieure nouvelle que je souhaitais continuellement obtenir de l'extérieur auparavant.
La pause m'a aidée à guérir, à me redécouvrir, à profiter de l'instant présent, à reconnaître ma valeur, à me positionner sur le succès et sa signification pour moi, à prendre davantage soin des autres, à embellir mon image, à découvrir mes goûts et mes passions que je ne connaissais pas, à être plus zen et à véritablement vivre, au fond. Ce n'était pas si compliqué de trouver le bonheur. Il fallait simplement que je cesse de lui courir après comme je le faisais.
Quand on a trop de temps et trop peu de projets pour l'occuper, on sent que notre vie n'a aucun sens. Qu'on ne s'en va nulle part véritablement et qu'on perd tout ce précieux temps à ne rien faire plutôt qu'à changer le monde, par exemple. Je suis toujours vivante pour le raconter, mais à certains moments où il y avait tous ces trous dans mon quotidien, je me sentais si inutile, comme si simplement vivre pour ne rien accomplir était invalide et impensable. Je savais pertinemment que quiconque aurait payé cher pour se retrouver dans mes chaussures - ou dois-je dire, mes pantoufles -, et d'être gratifié de tout ce temps à remplir. C'est vrai : dans notre société où le succès rime avec effort et que l'effort se caractérise par le travail, on assimile bien mal le fait qu'une personne n'occupe pas son temps à travailler et du coup, à tendre vers le succès pour s'accomplir. Je savais que ma situation était temporaire, mais parce que j'avais appris tous ces concepts que la société m'avait inculqués durant mon parcours académique, il m'était difficile de voir les choses autrement. Que j'avais le droit de respirer, de rester en robe de chambre toute la journée, de n'avoir aucun rêve ou objectif immédiat et d'être tout de même une personne valable de la société qui pourra tendre vers ce si précieux succès plus tard dans sa vie.
Je n'ai pas eu de plaisir au début à avoir tout ce temps libre qui pesait lourd sur mes épaules. Je sentais que j'avais une responsabilité envers l'humanité de contribuer à son épanouissement et que ma réaction de ne rien faire chez moi n'était pas une solution socialement acceptable. Je cherchais toujours un emploi, mais rien n'arrivait à satisfaire mes ambitions et si une entreprise m'intéressait, je n'étais pas la bonne candidate. J'ai donc cessé d'investir autant d'efforts pour finir les mains vides et j'ai accepté de rester chez moi pour un bout de temps. J'en avais peut-être besoin?
J'avais ce doute sur ma raison de vivre, sur ma valeur et j'étais excessivement dure avec moi-même. Jusqu'à ce que je prenne du recul et que je me donne le droit de regarder les faits d'une manière plus lucide : j'avais eu beaucoup de succès durant mes études, j'avais sacrifié et mis de côté tous mes loisirs pendant de nombreuses années, j'avais remporté de nombreux prix qui m'avaient distinguée de mes pairs et qui témoignaient de mes efforts soutenus, j'avais élaboré de nombreux projets et fait de nombreuses listes -mes fameuses listes...-, j'étais bien entourée et heureuse en général, j'avais toujours des rêves et des ambitions futures, je conservais cette personnalité que j'avais bâtie depuis mon plus jeune âge, bref. Me rappeler ma valeur était crucial devant ce jugement très dur que je posais sur moi-même en cette période que je qualifie de pause professionnelle. Je me rappellerais sans doute cette longue pause interminable dans quelques années comme un moment privilégié de mon existence. Ne restait plus qu'à le faire compter.
J'ai misé sur la redécouverte de ma personne durant la pause, donc d'un point de vue plus privé, cet instant de ma vie m'a permis de reprendre du mieux et de reconsidérer toutes les avenues possibles de ma vie. Je n'aurais sans doute jamais franchi ce pas si j'avais été occupée comme j'avais l'habitude de l'être, avec les études, le travail et les activités en plus. Et cela m'a d'ailleurs amenée à réaliser à quel point notre société moderne oublie l'importance de la santé mentale comme base primordiale au succès, qu'il se manifeste dans l'une ou dans l'autre des facettes de notre vie. J'ai réalisé à quel point je me suis infligée du mal en me privant de sorties, d'emplois, d'opportunités, de moments de détente, le tout durant mes études où je tendais vers ce succès académique de manière - avouons-le maintenant - maladive. J'ai réalisé qu'en remplissant ce temps et tous ces trous dans mon agenda, je me rendais psychologiquement et physiquement malade. Je passerais d'ailleurs de nombreux mois durant ma pause à réparer ces séquelles que je m'étais infligées et toute cette négligence envers la base que je suis : ma personne avant tout, mon corps, mon mental et mon âme. Tant de gens que je connais ne prennent aucun instant pour eux seuls, ne se dorlotent jamais, ne s'arrêtent jamais pour vivre ce si précieux instant présent que tous semblent voir comme une entité presque divine aujourd'hui. Il m'aura fallu constater les dégâts trop tard et longtemps après coup pour pleinement réaliser la négligence dont j'étais désormais affligée.
Ma pause m'a permis de cesser la critique envers mon inaction, mais aussi envers mes actions. J'ai cessé de prioriser catégoriquement toutes ces choses par devoir avant celles qui me permettaient de profiter de la vie, d'être heureuse et en santé. Je me suis mise à méditer et à reprendre le yoga là où je l'avais laissé. Je me suis permis d'apprendre que ne rien faire pouvait m'apporter du bon. Lâcher prise sur le sérieux de l'existence. Je me suis intéressée aux jeux vidéos, qui n'apportent rien d'autre que du loisir et que je voyais avant comme une perte de temps totale. J'ai cuisiné beaucoup et j'ai pris du temps pour faire plaisir à MEC davantage qu'auparavant par de petites attentions. J'écoutais mieux mes amis et mes proches. J'ai pris des marches, j'ai pris de nombreux moments pour apprécier la qualité de ma vie et la beauté de la nature sauvage du Yukon. J'ai fait des plans pour mon futur, des trucs que j'avais mis de côté ou que je m'étais dit que je ne serais jamais capable d'accomplir. J'ai écouté de nombreux documentaires pour apprendre et garder la flamme de la connaissance toujours allumée dans mon esprit. J'ai lu beaucoup, tricoté, dessiné, écrit. J'ai guéri de mes anciennes blessures en laissant le passé derrière moi. J'ai pris des bains aussi, chose que je ne m'étais pas permis de faire depuis longtemps, comme si j'avais abandonné la relaxation. J'ai aussi réappris à prendre soin de mon corps, à m'offrir du repos de qualité et à investir dans le confort. J'ai racheté du maquillage et j'ai pris davantage de temps à me dorloter et à embellir mon image que j'avais négligée.
J'ai davantage appris en ne faisant pas grand chose qu'en voulant tout faire en même temps. J'ai appris à déterminer de nouvelles limites et à rêver de projets ambitieux. J'ai appris à ne rien faire et à être tout de même bien et heureuse. J'ai appris à reconnaître que pour moi, le succès véritable est celui de savoir contrôler sa vision-même du succès. Je me suis découvert une force intérieure nouvelle que je souhaitais continuellement obtenir de l'extérieur auparavant.
La pause m'a aidée à guérir, à me redécouvrir, à profiter de l'instant présent, à reconnaître ma valeur, à me positionner sur le succès et sa signification pour moi, à prendre davantage soin des autres, à embellir mon image, à découvrir mes goûts et mes passions que je ne connaissais pas, à être plus zen et à véritablement vivre, au fond. Ce n'était pas si compliqué de trouver le bonheur. Il fallait simplement que je cesse de lui courir après comme je le faisais.